White land
Un autre jour dans mon nouvel et provisoire univers. Aide soignante. Les gens rigolent limite quand je leur raconte que je fais ça, ok je n'ai aucun diplôme, par contre pas besoin d'avoir fait d'études pour faire le ménage, faire des toilettes et servir des repas quand même... après, ce qui touche aux ordonnances et aux médicaments, au traitement lui-même, évidemment je ne m'occupe de rien. Juste être au service de personnes qui en ont réellement besoin à un point qu'à l'extérieur on n'imagine même pas. Pendant seulement un mois, puis ensuite j'essayerai, comme la dernière fois, de faire complètement abstraction et entrer dans mon autre nouvel univers... mon premier amour :-) l'édition.
Je ne sais pas si c'est parce que je suis plus âgée ou que j'avais vraiment besoin de me remettre les idées en place, mais cette fois-ci je suis énormément touchée par ce métier que je fais. Il me marque la journée, mais le soir et la nuit c'est encore pire. L'autre fois j'en ai carrément rêvé, mais ce sont juste des pensées, des visages, des diagnostics difficiles à accepter, même pour des gens que je ne connais pas et avec lesquels on a petit à petit une relation de confiance/dépendance, relation qui se définit par une phrase, un sourire, un surnom, des habitudes, un regard, une confidence. C'est cela qui m'agrippe en quelque sorte et ne veut pas me lâcher. Je me donne l'obligation de ne pas oublier tout ça. Aujourd'hui et cette année, j'ignore pourquoi mais c'est devenu d'une impotance capitale. Je ne ferai sans doute jamais ce métier, même si je prévois de faire une dizaine de choses différentes dans ma vie, parce que j'ai très peur de m'ennuyer et je décide par exemple de continuer en service de presse dans l'édition, tout simplement parce que je n'en ai pas encore trouvé toutes les couleurs. Je ne ferai donc probablement jamais ni aide soignante ni infirmière "en vrai" mais j'en garderai toujours cette marque que je me suis volontairement faite, au service d'un endroit qui compte tellement pour moi, et pour se murs, et pour ses valeurs, et je suis vraiment heureuse, je réalise la chance que j'ai d'avoir pu vivre à fond cette expérience.
Il me reste encore plusieurs jours. Je suis crevée, le matin c'est hyper dur. Tout à l'heure j'y retourne. C'est aussi quelque chose d'étrange, quand je me dis "tout à l'heure j'y retourne". Je ne sais pas ce que je vais y trouver et c'est à la fois très très flippant, à la fois mon coeur est apaisé. Je sens que je ne suis pas devenue complètement superficielle et que peut-être, si je garde cette marque, je ne le serai jamais. Il ne faut pas oublier dans mon cas que "un livre c'est un livre". Ca a l'air débile mais j'écris ça pour m'en souvenir. Tellement de gens l'ont oublié, j'vous jure !!
Bon, je voulais écrire un peu ce matin. Je sais que les tartines c'est pas les meilleurs articles que je fais... je mets une 'tite image juste pour le principe mais je voulais vraiment faire un texte là-dessus. Malheureusement, ou pas, au sortir de mon service d'hôpital je n'ai le droit à aucune référence, aucun détail. C'est la loi et c'est logique. Je ne peux donc pas vous raconter grand chose, pourtant ce sont des choses qu'il est très dur de garder pour soi et qui font que je me réveille la nuit, ce sont des choses qui changent une vie et qu'on ne peut pas oublier. Ca change la vision de voir les choses, on voit les gens dans un état qu'on ne souhaite absolument pas aux gens qu'on aime et justement c'est ça qui change la vision des choses. Il vaut mieux mourir avant... Parfois vraiment on ne réalise pas ça...
Allez, j'arrête, et il est temps pour moi de vous souhaiter une bonne journée...